COMMENT FAIRE GRÈVE?

Assises féministe – Bienne – 10 mars 2019 – Intervention de
Geneviève de Rham du Collectif vaudois (pdf)

Une grève, c’est arrêter de faire de que l’on fait normalement pour faire entendre des demandes et des revendications.

Pour les femmes et les minorités de genre, les revendications sont innombrables, car ce sont tous les aspects de la vie qui sont marqués par le genre, aussi bien pour les jeunes femmes, que pour les femmes adultes ou âgées. Une grève peut avoir lieu au travail, en particulier dans les endroits où travaillent beaucoup de femmes comme les hôpitaux, les établissements médicosociaux, les crèches et garderies, la vente, les soins à la personne (coiffeuse, esthéticienne), etc.

Mais on peut aussi organiser une grève dans un quartier, dans une école, dans un centre de loisirs, à l’Université.

La première chose importante pour une grève, c’est que les participantes soient nombreuses.

C’est le nombre qui permet de modifier le rapport de forces et de s’engager dans une grève sans risques de représailles.

La grève au travail

Je parlerai d’abord de grève sur le lieu de travail, en prenant l’exemple du secteur de la santé que je connais bien. Lors de grèves dans les années 1990, des collègues se sentaient partie prenante du mouvement de grève tout en assurant le service minimum auprès de patients ou de résident.e.s d’EMS. Pour cela il est très important de s’organiser avant. Pour organiser une grève, il faut : Identifier les problèmes les plus ressentis pour y opposer des revendications. C’est dans la discussion sur ce que l’on va faire lors de la grève que les différentes propositions peuvent être discutées, soupesées, puis décidées. Se mettre d’accord sur ce que l’on veut faire ou pas.

Dans le secteur de la santé, on peut prendre comme modèle d’organisation du travail l’idée de « travailler comme un dimanche » pour garantir les soins qui sont indispensables. Il est essentiel de savoir comment on va s’organiser pour faire grève. Il est très important que les participantes soient d’accord afin de constituer l’unité indispensable pour affronter la discussion avec la direction. Faire connaître la grève aux collègues et annoncer à la direction ce qui va se passer.

Le mieux, c’est de créer un collectif de femmes en grève sur le lieu de travail, qui peut s’adresser à un syndicat ; et s’il n’y a pas de syndicat, il faut prendre contact avec le Collectif le plus proche. Se rendre visibles pendant la grève : mettre des drapeaux, des banderoles, des habits de travail aux fenêtres ; sortir ensemble dans la cour ; prendre des vidéos, des photos ; appeler la presse. Des collègues qui ne travaillent pas le 14 juin peuvent venir pour soutenir la grève en prenant sur leur jour de congé. Rassembler des soutiens pour la grève : des personnes d’un comité de quartier, des syndicalistes, des artistes, des élu.e.s politiques, des personnalités qui viennent saluer les grévistes et soutenir leurs revendications, etc.

Mais il y a aussi d’autres manières de marquer que la journée de travail du 14 juin 2019 n’est pas une journée comme les autres

Même si on ne fait pas de grève à proprement parler. Par exemple, prolonger ensemble la pause ; se regrouper pour sortir dans la cour à 11 h, partager un piquenique à midi, porter – tout en travaillant – un accessoire violet, un tee-shirt ou un badge de la grève des femmes… Et bien d’autres idées encore pour montrer que le 14 juin 2019 est une journée particulière, la journée de la grève féministe et des femmes, même si on ne peut pas arrêter le travail. La grève du ménage et des soins, de l’école et de la consommation La grève féministe doit aussi s’étendre en-dehors des lieux de travail pour rendre visibles tout ce qui nous gâche la vie : les tâches ménagères et les soins aux enfants systématiquement assumées par les femmes, les violences sexistes, l’invisibilisation de la présence de femmes dans l’espace public, etc… Là aussi il faut :

Ne pas faire ce qu’on fait d’habitude, comme nous le disions en 1991 : d’habitude on range, aujourd’hui on dérange ! Pas de lessive, pas de courses, pas de taxi, pas de charge mentale !

Créer un collectif dans votre quartier et discuter avec les voisines, distribuer le matériel des collectifs devant les commerces ou les écoles. Être nombreuses, se rassembler, se rendre visibles, appeler des personnalités à nous soutenir, prendre des photos et des vidéos pour faire connaître notre mouvement de grève et nos revendications, appeler la presse Pour faire simple, la grève féministe et des femmes du 14 juin 2019 doit être un mouvement le plus grand possible qui permette de dénoncer les multiples facettes de l’exploitation, de la domination et de l’oppression des femmes. Et dans ce mouvement, des hommes solidaires peuvent apporter une aide très utile, d’abord en permettant aux femmes* de leur entourage de participer à la grève, ensuite en assumant des tâches qu’ils ne font pas d’habitude, enfin en se portant volontaire pour aider les collectifs, par exemple pour faire à manger ou garder les enfants.

La grève des femmes du 14 juin 1991 a montré qu’il y a mille raisons et mille façons de faire grève ; il suffit de s’y mettre en conjuguant nos forces comme nous le faisons aujourd’hui dans ces Assises féministes !